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Le funiculaire de la chocolaterie Suchard (Suisse)

Le funiculaire dit 'Suchard'

 

 

Description du funiculaire

Le projet de Henri Ladame consistait à relier directement la ligne de chemin de fer du Jura-Simplon au fond du vallon par un plan incliné descendant depuis de la gare de Serrières.

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Le vallon de Serrières en 1895.
Avec au bord du lac de Neuchâtel, le petit train Régional du Vignoble qui est actuellement encore en service avec la ligne 5 du train régional Neuchâtel - Boudry, puis l'alignement de la Cité Suchard. Au second plan, les usines Suchard juste devant le pont de la rue de Tivoli... et en arrière plan le viaduc de la ligne Jura-Simplon avec la gare de Serrières et le plan incliné du funiculaire qui relie la gare avec le fond du vallon!

Ce plan incliné était un véritable funiculaire à contrepoids d’eau avec deux plates formes circulant sur une voie unique avec un évitement central.

Mais la grande originalité de ce funiculaire c’est qu'il avait été conçu pour transporter des wagonnets de type Decauville sur ces plates formes. Cette configuration permettait ainsi d’assurer une continuité de circulation  des wagonnets entre un réseau ferré Decauville à plaques de ripage parcourant tout le vallon afin de desservir les différentes industries et la gare supérieure de Serrières, d’où arrivaient les matières premières et d'où repartaient les produits finis.

L'écartement des rails du réseau Decauville est de 50 cm.

Il est à noter qu’il n’y avait aucun moyen mécanique ou animal pour mouvoir tous ces wagonnets qui étaient poussés manuellement par les ouvriers !

On a souvent associé à tord ce funiculaire à la chocolaterie Suchard, peut être parce qu’il y était situé au centre des bâtiments de la chocolaterie et qu’il y avait une réclame Suchard sur le bâtiment supérieur du funiculaire. En fait le funiculaire a été construit dans un but de desservir TOUTES les industries du vallon et pas seulement les usines Suchard. Il fut utilisé par les autres industries, et même par les simples particuliers qui avaient des colis à expédier ou à recevoir par la ligne du Jura-Simplon.

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Le funiculaire d'Henri Ladame, dit le funiculaire 'Suchard'.
Coincé entre le viaduc du Jura-Simplon sur la gauche et les bâtiments des usines Suchard sur la droite.
Il part de l'intérieur d'un bâtiment de la gare de Serrières, passe sous la rue des Amandiers au niveau de l'évitement central avant de franchir la Serrière qui coule devant l'usine Suchard.

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Détail du plan du vallon de 1896.
En rouge, le funiculaire.

Pour décrire ce funiculaire il n’y a pas mieux que de reprendre la description qui lui a été faite dans "Le canton de Neuchâtel" par Quartier-la-Tente en 1897 :

<< Cette construction, unique en son genre, mérite une courte description :
La Halle supérieure du Plan Incliné, dont la pente est de 60 %, comprend deux quais de chargement, et est située au sud de la ligne du Jura-Simplon, à l’extrémité, côté est, du viaduc de Serrières, au centre d’un palier de 400 m de longueur, en alignement droit. Deux wagons avec caisse à eau, et à plate-forme tournante, l’un montant l’autre descendant, alternativement, circulent sur une voie unique de 1 m de large, ayant en son milieu, un évitement de 15 m de longueur. Ces wagons, dont le poids est de 3600 kg, transportent chaque voyage trois wagonnets Decauville chargés chacun de 800 kg de marchandises, soit ensemble 2400 kg. Le wagon descendant s’arrête en contrebas du sol, au niveau de la rue du village et les wagonnets qu’il porte sont dirigés sur rails dans différentes directions, distribuant les marchandises à chaque usine ou recevant celles qu’elle a à expédier.
Un seul employé, commandant le frein à ruban établi au sommet du plan incliné, surveille la marche des trains ; si, pour une raison quelconque, il venait à lâcher son frein, ce frein fonctionnerait automatiquement et arrêterait les wagons en quelques secondes. Les wagons sont pourvus, en outre, d’un frein automatique à ressort, assez puissant pour les arrêter à peu près instantanément, en provoquant le serrage énergique d’une mâchoire sur le rail, en cas de rupture du câble. Celui-ci, dit cloisonné, a été fourni par Felten et Guillaume, c’est le premier de ce système qui ait été employé en Suisse.
Le parcours des wagons transporteurs étant de 54m7, et la vitesse des trains de 1m50, les marchandises arrivent à la gare du Jura-Simplon en 36 secondes.
La capacité des réservoirs des wagons transporteurs est de 3500 litres. A vide, la quantité d’eau nécessaire pour les mettre en mouvement est de 600 litres. Cette eau est fournie par un réservoir cubant 40000 litres, et occupant toute la partie supérieure du pavillon qui abrite la station supérieure ; il est alimenté par une concession du Jura-Simplon et par l’eau de la Serrière. >>

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Détail du wagon avec sa plate forme pivotante en position pour recevoir les wagonnets provenant de la voie Decauville intermédiaire.
 
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Le funiculaire avec un des wagons transporteur à l'arrêt intermédiaire.
Notez la plate forme pivotante tournée de telle manière qu'elle puisse charger et décharger les wagonnets Decauville vers la voie ferrée partant sur la gauche.
Au premier plan, notez le réseau Decauville avec plaque de ripage et sur la droite, la dérivation pour desservir le bas du vallon de Serrières.

Outre que ce funiculaire  a été conçu pour transporter des wagonnets Decauville, son autre principale particularité c’est qu’il y avait un arrêt intermédiaire situé juste sous l’évitement central.
Cet arrêt intermédiaire permettait de desservir un autre réseau Decauville à plaques de ripage situé sous le funiculaire à un niveau intermédiaire entre le vallon et la gare de Serrières. Cependant la voie Decauville arrivait au niveau du funiculaire avec un angle d’environ 45° par rapport à la voie du funiculaire. La plate forme du chariot du funiculaire devait donc pivoter de 45° pour amener les wagonnets dans l’axe de la voie à desservir.
La grande curiosité de ce funiculaire était donc d’avoir des chariots équipés de plate forme porte wagonnets (3 maximum) et pouvant pivoter.

Reprenons le texte de Quartier-la-Tente de 1897 qui décrit le mécanisme mis en place pour gérer la station intermédiaire :

<< Pour la station intermédiaire, le but a été atteint au moyen d’un arrêt hydraulique (Hydraulischer Puffer). Lorsqu’il s’agit de faire arriver ou de charger des marchandises à cette station, le wagon transporteur n° 1 est descendu, lesté d’un mètre cube d’eau, jusqu’à la station inférieure où l’on a préalablement abaissé le mécanisme qui commande la soupape de vidange des wagons, puis à la station intermédiaire, on relève, au moyen d’un levier muni d’un disque, le buttoir calé sur une tige au milieu de la voie, tige qui commande le piston de l’arrêt hydraulique ; le wagon n° 2, chargé pendant ce temps à la station supérieure, est mis en mouvement, et en quelques secondes, remontant le wagon n° 1, vient heurter le butoir qui entraîne le piston dont nous venons de parler. Le cylindre dans lequel se meut ce piston étant légèrement conique, l’huile qu’il contient passe de plus en plus difficilement de l’avant à l’arrière du cylindre, de façon que la marche du wagon se ralentit peu à peu, et qu’à la fin de la course du piston, l’arrêt se produit sans secousse au point voulu. On fait pivoter la plate-forme du wagon transporteur autour de son axe, les wagonnets placés sur cette plate-forme sont dirigés sur les voies qui conduisent aux fabriques et remplacés par des wagonnets vides ; on laisse échapper l’eau dont le transporteur avait été surchargé, et le mécanicien, desserrant son frein, la wagon n° 1, entraîné par le poids du mètre cube d’eau remonte le n° 2 jusqu’à la station supérieure pour y être chargé de nouveau.
Le va et vient des wagons continue aussi longtemps que l’on a des marchandises à descendre ou à monter de la station intermédiaire. L’opération terminée, le mécanisme qui commande la soupape de vidange des wagons à la station inférieure est relevé, le buttoir de l’arrêt hydraulique est remis en place, et le mouvement entre les stations extrêmes recommence comme précédemment.>>

La Société du plan incliné a été dissoute le 31 décembre 1950. Les CFF (Chemins de Fer Fédéraux) reprennent alors les installations qui fonctionneront jusqu’en 1954, date à laquelle la chocolaterie Suchard cesse d’utiliser le funiculaire, ses expéditions étant dorénavant faites par palettes.

Le funiculaire et sa gare supérieure semblent avoir été détruits en août 1954.

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Détail du mécanisme de blocage du wagon transporteur au niveau de l'arrêt intermédiaire.
Notez, à gauche, le levier et sa roue qui commande, au moyen d'un câble, le relevage de la butée située entre les rails.
(photo Musée d'art et d'histoire de Neuchâtel)

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Autre vue de l'arrêt intermédiare.
Notez, à gauche, la roue avec son levier de commande.
Notez également à gauche, la voie Decauville en courbe qui disparait derrière la porte en bois.
(photo Musée d'art et d'histoire de Neuchâtel)


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Détail du bâtiment servant de gare supérieure du funiculaire avec la réclame "FABRIQUE DE CHOCOLAT PH. SUCHARD".
L"étage supérieur de ce bâtiment fait office de réservoir d'eau pour le remplissage des wagons du funiculaire.
(photo Musée d'art et d'histoire de Neuchâtel)


Cliquez pour agrandir.
Suchard13x.jpg Vue générale du funiculaire avec une partie des usines Philippe Suchard (P.S.)..
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Superbe photo du funiculaire passant sous la rue des Amandiers.

 

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Photo très intéressante montrant de funiculaire de côté à hauteur de l'évitement central (1904).
On peut voir distinctement un wagon transporteur avec sa plate forme pivotante encore en position 45°... sur la plate forme, trois chariots vides.
Ce document est exceptionnel car il montre le réseau Decauville intermédiaire qui passe sous le funiculaire. Deux voies de 50 cm parallèles avec une dérivation sur la gauche qui mène à la station intermédiare du funiculaire. Les trois voies se coupent par l'intermédiaire de deux plaques de ripage permettant aux chariots d'être ripés pour changer de voie.

 

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La gare de Serrières en 1904.
Les chariots Decauville viennent d'être remontés du fond du vallon par le funiculaire (la gare supérieure du funiculaire se trouve au fond du hangar sur la gauche). Les caisses de chocolat sont en train d'être transbordées dans les wagons du Jura-Simplon.

 



Données techniques
Début 2 juin 1892
Fin août 1954
Etat Etat1.gif
Type de funiculaire typfuni5.gif
Type de voies typvoie1.gif
Energie elecc.gif
Gare inférieure Vallon de Serrières (453,8 m)
Gare supérieure Gare de Serrières (482 m)
Longueur 54,70 m
Dénivellé 28,20 m
Pente maximum 60 %
Nombre de voitures 2
Poids du wagon transporteur 3500 kg
Volume d'eau 3500 litres
Poids total 7000 kg
Charge utile 3 wagonnets de 800 kg chacun = 2400 kg
Diamètre de la poulie principale 2,50 m
Quantité d’eau nécessaire pour une course à vide 600 litres
Vitesse 1,5 m/s
Ecartement 1 m

 



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Introduction

Le funiculaire dit 'Suchard'
- Le vallon de la Serrière
- Description du funiculaire
- Etat actuel

Le plan incliné des Battieux

Jeu 27